La rumeur, persistante bien qu’encore non confirmée, de la présence de l’ex-président Mahamadou Issoufou à Addis Abeba pour une conférence sur la ZECLAF, en marge du sommet de l’Union Africaine, jette une lumière crue sur les fragilités et contradictions du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP). Si cette présence est avérée, elle expose la complexité de la situation politique nigérienne depuis le coup d’État du 26 juillet 2023.
L’apparente liberté de mouvement de Mahamadou Issoufou, malgré son impopularité et les graves accusations qui pèsent sur lui, révèle un dilemme pour le CNSP. La population nigérienne, déjà échaudée par les soupçons de complicité entre l’ancien président et la junte, pourrait y voir une confirmation de ses craintes. Cette perception d’une justice non rendue et d’une protection accordée à l’ex chef de l’Etat par le CNSP ne fera qu’éroder davantage la confiance du peuple envers ses dirigeants actuels, augmentant ainsi le fossé entre gouvernés et gouvernants.
Cette situation offre un terreau fertile aux groupes de la société civile et autres opposants à la junte. En effet, la présence potentielle d’Issoufou à Addis Abeba pourrait être exploitée comme une preuve de l’incapacité du CNSP à tenir ses engagements de rupture avec l’ancien régime. Un tel scénario risque de galvaniser la résistance contre la junte, mettant en péril la stabilité déjà précaire du pays.
La confirmation de la présence d’Issoufou à Addis pourrait également être perçue comme un signe de faiblesse du CNSP, et entraîner des protestations qui pourraient exiger des mesures plus fermes contre l’ancien président et une amélioration significative de la gouvernance actuelle, mettant ainsi le CNSP face à ses responsabilités.
Face à cette éventualité, le CNSP se retrouve sous une pression accrue. Il lui incombe de démontrer non seulement son efficacité, mais aussi son engagement envers une lutte sincère contre les problèmes hérités de l’ère d’Issoufou Mahamadou, notamment la corruption, l’impunité et la mal gouvernance. La présence d’Issoufou à un événement international d’une telle envergure pourrait aggraver les défis auxquels la junte est confrontée, en termes de légitimité, de gouvernance et de stabilité.
Dans ce contexte, la junte au pouvoir doit agir avec prudence et transparence. Le Niger, à la croisée des chemins, ne peut se permettre un retour en arrière ou une persistance de l’impunité et de l’injustice.