Après trois (3) mois de diète liée à la décision inique du Nigéria de suspendre brutalement sa fourniture d’énergie électrique à notre pays, les consommateurs nigériens ont l’électricité de façon plus moins satisfaisante depuis le mois de novembre 2023 mais les caisses de la Nigelec saignent drastiquement.
La société est au bord du gouffre en fin d’exercice budgétaire 2023 et s’expose à une faillite inéluctable si des solutions idoines ne sont pas trouvées urgemment pour lui permettre de remonter la pente et maintenir le cap.
Cri d’alarme teinté de regret
La révélation émane de la Directrice Générale à l’occasion d’une cérémonie organisée par la société pour marquer l’anniversaire de la Nigelec.
Mme Fati Abarchi n’a pas fait de détours pour brosser à ses collaborateurs la situation sombre dans laquelle se trouvent les finances de la Nigelec, après un bref aperçu du contexte difficile qui a marqué la fin de l’année 2023.
Il s’agit, a-t-elle déclaré, ‘’d’une fin d’année particulièrement difficile marquée par la suspension des lignes d’interconnexion avec le Nigéria. Cette situation a causé des délestages préjudiciables à la satisfaction de la clientèle’’, a-t-elle regretté.
Lesquels préjudices, selon elle, n’ont pas permis à la société d’atteindre le niveau prévu en 2023 en matière de vente d’énergie, principale source des recettes de la Nigelec. ‘’Aussi, nos prévisions budgétaires ont été largement dépassées en termes de charges de fonctionnement avec un déficit de fin de comptes d’environ 15 milliards francs CFA. Nous sommes en pourparlers avec le gouvernement pour trouver une solution’’, a indiqué Mme Abarchi.
Perspectives sombres et solutions incertaines
A entendre la DG de la société, les indicateurs risquent d’être encore plus sombres au cours de l’année 2024, ‘’si les lignes d’interconnexion avec le Nigéria ne sont pas reprises’’. ‘’Un déficit de plus de 44 milliards CFA est annoncé dans nos prévisions budgétaires 2024’’, a-t-elle alerté.
Et cet effondrement des finances de la Nigelec aura pour conséquence directe la compromission de ‘’notre capacité d’entreprendre de nouveaux investissements et en même temps certaines dépenses de fonctionnement seront revues à la baisse afin d’assurer notre équilibre de fonctionnement’’.
Cette descente aux enfers de la société est essentiellement due au coût élevé de production locale de l’énergie à partir des centrales diesel qui tournent à plein régime depuis pratiquement la suspension des lignes d’interconnexion à partir du 1er août 2023 par les autorités nigérianes, en application des sanctions illégales, sauvages et criminelles imposées par la CEDEAO à notre pays, en représailles contre le coup d’Etat militaire ayant renversé le président Bazoum Mohamed le 26 juillet 2023.
Selon la DG, la Nigelec dépense quelque 90 millions francs CFA de carburant/jour pour faire tourner ses centrales diesel fonctionnelles pour produire l’électricité et satisfaire sa clientèle.
Est-ce avant ou après la mise en production de la centrale solaire de Gorou Banda II censée produire 30MW pour combler une partie du déficit lié à la suspension des lignes d’interconnexion en provenance du Nigéria et améliorer substantiellement la fourniture d’électricité à Niamey et ses localités environnantes ?
Une appréciation empirique du coût financier journalier en carburant, du fait de la suspension des lignes d’interconnexion du Nigeria, avancé par la DG peut paraître énorme.
Mais de là à souhaiter un rétablissement rapide desdites lignes avec le Nigeria nous paraît totalement absurde et inconcevable au regard de l’attitude ingrate et déshumanisante dont ont fait preuve les autorités nigérianes vis-à-vis de notre pays.
Selon certaines indiscrétions, des négociations entre les deux parties devraient reprendre depuis janvier dernier en vue du rétablissement des lignes d’interconnexion, mais cela n’a pas eu lieu jusqu’à l’intervention de la décision historiques des trois (3) pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) de se retirer de la CEDEAO. C’est tant mieux !
L’accès à l’indépendance énergétique est un impératif stratégique pour tout pays qui aspire au développement.
Dans une récente interview dans les deux principales langues couramment parlées au Niger (Hausa et Djerma) et la langue de travail (Français) à la RTN, le chef de l’Etat Tiani Abdourahamane a laissé entendre qu’on payait ‘’7 millions de dollars/mois’’ à la nigériane d’électricité (NEPA) pour l’achat de l’énergie.
Comment le Nigéria peut-il se permettre de suspendre sans préavis un tel contrat avec un partenaire – qui est en plus un pays voisin et frère – pour croire qu’on peut tourner cette page sombre et renouer le partenariat en matière de fourniture d’énergie électrique ? Pour subir demain encore le même traitement inhumain, au moindre contentieux politique ? Il n’y a pas de regret !
La Nigelec fait partie des sociétés d’Etat les plus viables du pays. Cette crise financière qu’elle traverse actuellement est liée à sa mauvaise gestion durant les 12 ans et demi de règne des Tarayyistes, qui l’ont carrément transformée en coffre-fort de leur parti.
Mais aussi leurs investissements désastreux dans le secteur de l’énergie comme l’atteste la construction de la centrale thermique de Gorou Banda inutilement onéreuse alors qu’il y avait des options plus viables et moins ruineuses pour la société.