Déjà, avec la sortie inopinée des États de l’AES ( Alliance des États du Sahel) de la CEDEAO, les membres lucides de cette organisation en ont perdu le sommeil, et si en plus, le pays de la Teranga y met du sien, et bascule dans la défiance, nul ne peut en douter, c’est toute l’Afrique de l’Ouest qui risque d’entrer, de plain-pied dans une ère de bouillonnement et d’instabilité chronique, propice à toutes les aventures, mais aussi à toutes les refondations robustes et pérennes.
L’observateur anxieux voit, sidéré, qu’il y a une dynamique en cours que personne, en réalité, n’arrive à maîtriser, et cela depuis un certain temps. Un peu plus d’une décennie. Cette force irrésistible semble obéir à des lois dépassant les connaissances et capacités humaines. Certains parleront de l’immanence divine et d’autres de la dialectique historique, ou encore, tout simplement, de la roue de l’histoire, qui tourne imperturbablement. Le pyrrhonisme que vous pouvez opposer à ces différentes thèses se veut cartésien. Par arrogance. Quoi qu’il en soit, faute d’entrevoir une finalité lointaine, tâchons d’en démonter les mécanismes.
DAKAR, CAPITALE DE L’AOF
La capitale sénégalaise a aussi été celle de toute l’ AOF (Afrique Occidentale Française) et, à cet titre, d’une manière ou d’une autre, a toujours donné le ton à l’ensemble de l’Afrique de l’ouest. A la vérité, la francisation du Sénégal était telle que certaines ‘’mauvaises langues‘’ qualifiaient ce pays de département français et son président de préfet français. D’autant plus qu’après les indépendances formelles des années 1960, le ministre sénégalais de l’Intérieur était un Français… C’est dire !
Après l’échec de la fédération Ghana, Guinée, Mali, le président Modibo Keita, s’est rabattu sur une Alliance Sénégal-Mali, qui sera immédiatement torpillée par Félix Houphouet-Boigny, sur les directives de Paris. Le Sénégal, bon élève de la démocratie cousue- main par les occidentaux, est un monument auquel ces derniers tiennent comme à la prunelle de leurs yeux. Il est donc hors de question, qu’ils le laissent basculer vers une évolution dont ils n’ont pas le contrôle absolu. Or, que voyons-nous ?
La CEDEAO, tout comme l’Union Africaine, deux organismes qu’ils contrôlent, peu ou prou, après une légère tergiversation, se dresse soudain contre le coup d’Etat constitutionnel de Macky Sall, voulant s’offrir une rallonge de dix mois. L’Oncle Sam et, naturellement l’Hexagone, leur emboîtent le pas, tout en sachant cependant que Macky Sall n’est pas homme à reculer devant le danger. Quel qu’il soit. Irrémédiablement, on va vers une intervention pure et simple de la Grande Muette. Est-ce une issue souhaitée et souhaitable ? Et pourquoi ?
UN COUP D’ETAT INEXORABLE
Pour Macky Sall, tout vaut mieux qu’une éventuelle élection à la présidence de la République de son ennemi juré, Ousmane Sonko, ou l’un de ses affidés. Il préférera un coup d’Etat militaire en bonne et due forme, qui mettra les pendules à l’heure, plutôt qu’une victoire envisageable, d’un camp revanchard qui ne lui fera pas de cadeaux.
Pour la CEDEAO et l’Union Africaine, ce sera la quadrature du cercle. Comment prendre des mesures, de quelque nature qu’elles soient, contre une locomotive et un parangon de la démocratie ? De ce fait, l’embarras des deux organisations précipitées, ne peut que réjouir les membres de l’AES, qui y verront des arguments venant renforcer leurs postures souverainistes. Si le Sénégal bascule, et il va basculer, selon notre pressentiment, l’Afrique de l’ouest sera en ébullition, pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur étant, l’éclosion des États-Unis d’Afrique. Ce qui est écrit est écrit. Personne ne peut rien y changer.