Comme vous le savez, le Niger a fait son retour sur le marché financier de l’Union monétaire ouest-africaine. En effet, UMOA-Titres, en collaboration avec la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), a organisé, vendredi 26 avril, à la demande de la Direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique du Niger, une émission simultanée de Bons et Obligations Assimilables du Trésor respectivement à 364 jours, 3 ans et 5 ans aux taux d’intérêt respectifs de 6,30% et 6,50%. L’objectif initial de 420 milliards de francs CFA sera dépassé, les offres des investisseurs s’étant établies à 457,99 milliards de francs CFA. Les soumissions totales pour les Bons à 364 jours ont atteint 304,6 milliards de francs, tandis que les Obligations à plus long terme ont mobilisé 122,3 milliards pour les 3 ans et 31 milliards pour les 5 ans.Le taux de couverture du montant mis en adjudication par les soumissionnaires est de 109,29%.
Mais ce succès cache des réalités nettement moins reluisantes. Les investisseurs ont fait montre de prudence, en préférant des placements à court terme. Les conséquences de cette prudence ne se sont-elles pas manifestées sur les rendements exigés dès l’émission ? En effet, le rendement moyen pondéré des bons à 364 jours a atteint 9,30% tandis que celui des obligations à 3 ans s’élève à 9,35% et à 8,68% pour celles à 5 ans. Ces rendements exigés par les investisseurs demeurent nettement supérieurs à ceux observés dans d’autres pays de la sous-région ouest-africaine.Si nous prenons le cas du Togo, les rendements des titres à 12 mois et à 3 ans sont respectivement de 7,65% et 7,91%. Lorsd’une émission similaire, la Côte d’Ivoire, a enregistré des rendements de 7,54% pour les obligations à 3 ans.
Par ailleurs, les taux pratiqués (6,30% et 6,50%) ne risquent-ils pas d’aggraver la situation du Niger, un pays étranglé par ses dettes ? Les 457,99 milliards mobilisés par le Niger seront consacrés au remboursement de la dette du pays sur le marché financier de l’UMOA. Un cercle vicieux. Récemment, le Niger avait signé avec la China National Petroleum Corporation (CNPC) un mémorandum d’entente visant la commercialisation du pétrole brut d’Agadem. Selon les termes de l’accord, Niamey recevra une avance de 400 millions $ de la part de la CNPC, montant qui sera restitué avec un intérêt de 7% dans les douze mois suivants. Pour une gestion prudente de la dette, le Fonds monétaire international (FMI) avait toujours proposé à Niamey d’opter pour les prêts concessionnels (autour de 2%) pour ne pas alourdir davantage la dette du pays.
Le recours à l’endettement pouvait jouer un rôle essentiel pour le développement, mais des niveaux insoutenables fragilisent la croissance et pénalisent les pauvres. Selon la Banque mondiale, à condition d’être bien gérée, transparente et utilisée dans le cadre d’une politique de croissance crédible, la dette peut être un levier. Mais ce n’est que trop rarement le cas. Un endettement public élevé peut freiner les investissements privés, accroître la pression budgétaire, réduire les dépenses sociales et limiter les capacités du gouvernement à mettre en œuvre des réformes.