« Succession au trône du Sultanat de Dosso. Face aux éternels opposants à la chefferie, les héritiers restent sereins », lit-on en page 6 de notre précédente parution. À quelques détails près, ce texte à un air de déjà-vu, de déjà-entendu. Depuis un certain temps, les successions à la tête des chefferies traditionnelles au Niger sont des versions tropicalisées de Game of Thrones. Quoi qu’on dise, la chefferie traditionnelle est ce qu’il nous reste de nos valeurs ancestrales. Elle n’est point archaïque, comme le prétend une certaine opinion. Bien au contraire, elle est la passerelle qui nous permet de revisiter notre passé dans un monde où les mœurs se meurent. Nul ne peut soutenir le contraire, il pèse une grosse menace sur la chefferie traditionnelle. Cette institution antique perd de sa substance d’année en année.
Aujourd’hui, l’on ne compte plus les chefs mal élus, ou PAS DU TOUT ÉLUS. Aucune partie du Niger n’échappe à des querelles nées d’une succession à la tête d’une chefferie traditionnelle. Rappelez-vous de cet épisode absurde survenu à Zinder où en juillet 2001 le sultan Aboubacar Sanda a été destitué pour se voir réinvesti à la tête du Damagaram une décennie plus tard, le 9 juillet 2011. Cet exemple ahurissant prouve combien les dépositaires de l’autorité coutumière sont à la merci du politique. Pourtant, les voies, les usages et les rites pour élire nos chefs traditionnels existent avant même la pénétration coloniale. C’est un héritage qui nous vient des fonds des âges, nos contrées ont toujours été régies selon des procédures bien précises et respectées de tous. En se posant en ‘’maître de cérémonie’’ de l’élection des chefs traditionnels, l’État atomise des siècles de procédure bien établies. Conséquence, nous avons de plus en plus de ‘’chefs’’ acquis au pouvoir avec souvent une légitimité douteuse. L’article 12 de la LOI N° 2015-01 du 13 janvier 2015 portant statut de la chefferie traditionnelle en République du Niger érige l’État en ‘’faiseur de chef traditionnel’’ : « Pour examiner la régularité des candidatures et connaître des contestations éventuelles à l’occasion des successions des chefs traditionnels, le Ministre chargé de l’administration territoriale met en place une commission ad hoc dont il fixe la composition et les modalités de fonctionnement ». Il est temps d’amoindrir le pouvoir de l’État dans les successions à la tête de nos chefferies traditionnelles. Il est temps de permettre aux autorités coutumières de gérer, en toute liberté et indépendance, les successions en leur sein dans le respect de la tradition. Il est temps de mettre fin à ces successions à hauts risques. Les faux ayants droit et autres aventuriers ne doivent plus perturber les processus d’élections des chefs traditionnels au Niger.