C’est une véritable capitulation en rase campagne. Que va faire la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) lors de la prochaine réunion de ses membres, probablement le 24 Février 2024, disent certains. Se sentant sur des charbons ardents, le chef de l’Etat du Bénin, Patrice Talon, avait déjà devancé ses pairs, en claironnant, à tout vent, son intention ferme d’ouvrir ses frontières avec le Niger. Pour ne pas donner l’impression d’un sauve-qui-peut général, “on” a conseillé au Bénénois d’éviter de faire cavalier seul, et d’attendre, en bon ordre et en rang serré, une décision commune, qui ne saurait tarder. Le voyant quelque peu réfractaire, “on” lui intima alors l’ordre de se conformer à la discipline de groupe. Ce qui fut fait. Une chose est de lever les sanctions contre le Niger, autre chose est d’assumer les conséquences d’un acte irresponsable, flirtant avec l’action criminelle. Avant tout, au delà du brouillard des arguties des uns et des autres, quels étaient les fondements d’une telle hostilité, n’ayons pas peur de le dire, paroxystique ? Quoi qu’il en soit, la CEDEAO est indubitablement sortie des clous. Et cela se paye.
DOMMAGES INCOMMENSURABLES
Le traumatisme qu’ont subis les peuples du Sahel en général, du Niger en particulier, ne peut guérir du jour au lendemain. C’est dans leur chair que des millions de ressortissants de ces contrées-là, ont enduré toutes sortes d’humiliations, de privations, de souffrances et d’angoisses du lendemain. Rien de matériel ne pourra jamais réparer ce mal-là. Des milliards que l’on deverserait sur le Niger n’effaceront pas de si tôt la rancœur accumulée au fil des mois, et enracinée au plus profond des Êtres. Les apprentis-sorciers ne s’en rendaient pas compte. Trop tard. Le mal est fait. Il faut essayer, un tant soit peu, de le circonscrire, dans le temps et dans l’espace. Au plan financier, les pays ayant trempé dans cette cabale devront rembourser tout le manque à gagner et les pertes des opérateurs économiques Nigériens. S’ils ne le peuvent pas, ils auront la latitude de se tourner vers leur mentor, qui ne sait pas encore qu’il a ouvert la boîte de Pandore.
LA CEDEAO, FLEAU DE L’OCCIDENT
A partir du moment où ce sont les puissances extérieures qui financent le fonctionnement d’une organisation régionale africaine, on ne peut guère s’étonner que celle-ci, peu ou prou, soit aux ordres, ou, à tout le moins, à l’écoute attentive des bailleurs de fonds étrangers.
Ces derniers mettent en avant leur souci d’inciter nos pays à s’adonner à une bonne gouvernance et à préserver les atouts essentiels d’une démocratie de type libéral. Posture fort louable, mais, malheureusement, à géométrie variable, quand on ne la met pas tout bonnement, entre parenthèses, selon les points focaux du moment. Peut-on dire que la CEDEAO, objectivement, a outrepassé ses prérogatives en imposant des sanctions abstruses et iniques au Niger ? A priori, non, puisque dans le protocole additionnel, toutes ses décisions prises sont inscrites dans un chapitre complémentaire. Le hic, c’est que ce protocole additionnel n’a pas reçu l’aval indispensable des État membres, n’ayant pas été ratifié par les Assemblées nationales concernées. En outre, la violation du protocole universel donnant accès à un littoral pour les pays de l’hinterland ne plaide pas pour la bonne foi des “Pieds Nikelés” de l’organisation régionale. C’est-à-dire que dans le domaine des réparations, on peut défricher large. Le Niger, quant à lui, a déjà préparé sa facture avec une bienveillante annonce d’échéancier raisonnable. C’est toujours ça de pris. Le gros payeur, dindon de la farce, risque d’être l’UEMOA. Elle qui a abusivement bloqué les avoirs du Niger, en se basant sur un protocole additionnel non ratifié par ce dernier. Devant n’importe quelle juridiction nationale, continentale ou planétaire, notre pays aura sans conteste, gain de cause, les mains dans les poches.
Quand on fera tous les comptes, l’addition sera salée pour l’Hexagone et ses suppôts qui l’ont suivi aveuglément. Ce ne serait que justice. Le temps est révolu où le Colon pouvait se vautrer sur une chaise-à-porteurs, en vociférant des ordres tyranniques, sans queue, ni tête.
COMMENT PARDONNER
Il est vrai que Patrice Talon est revenu à de meilleurs sentiments à l’égard du Niger. Mais notre pays est déjà dans une dynamique de rapprochement économique avec le Togo voisin, au détriment du Bénin. La démarche semble irrévocable. Les plaies sont encore vivaces entre le Niger et le Bénin, sous le regard éploré des populations riveraines des deux côtés de la frontière. En réalité, il faut prendre de la hauteur. Au plan géostratégique, un nouvel ordre est en marche. Les pays du BRICS ( Brésil, Russie, Inde, Chine, South Africa), inexorablement, entendent s’ériger comme un pôle faisant contre- poids à l’ONU, sous l’emprise des Occidentaux. Dans le Capharnaüm qui se dessine, les pays du Sahel, embryon d’une entité politique plus grande, semble avoir choisi leur camp. Celui qui leur assurera plus d’équité et de souveraineté, toutes choses, que leur dénie le camp occidental.